Eclairage

Lampes à huile

Bordier-Marcet, (1768 – 1835), successeur d'Argand, s'est illustré dans le perfectionnement des lampes à huile à réflecteurs paraboliques, aussi bien à usage domestique que dans l'application à l'éclairage urbain et aux phares maritimes.

Sa « lampe astrale », à réservoir circulaire entourant le brûleur, brevetée en France en 1809-1810, fait date dans l'histoire de l'éclairage : si la puissance demeure assez faible, du moins, l'ombre du réservoir latéral disparaît. Sa lampe, qui annonce la lampe « sinombre » des années suivantes, est élégante et peut se voir couronnée d'un globe supporté par le réservoir. Il en existe des versions de luxe, avec un pied réalisé en diverses matières nobles.

Bordier-Marcet vient de tester avec succès, à l'église Saint-Roch, son nouveau système d'éclairage par lampes astrales. Il s'adresse au journal pour en faire la publicité. «L'essai que j'ai fait cet automne dans l'église de St Roch pour l'éclairage avec des lampes astrales a paru assez satisfaisant à son respectable curé, pour lui faire désirer un essai plus complet et je me suis empressé de l'effectuer. Mes fonctions de cette nuit et celles de la semaine sainte seront donc servies par ce nouvel éclairage religieux et les dispositions que j'ai prises me font espérer qu'il paraîtra digne du sujet et de la majesté du lieu

Il participe également largement au développement de l'éclairage urbain à Paris vers 1810, imposant un type de candélabre à réflecteur de sa conception.

Dans le domaine des phares maritimes, il réalise l'appareil d'éclairage, composé de six réflecteurs, du phare du plateau du Four, à l'entrée de la Loire, en 1819. Il conçoit également, en 1835, l'appareil d'éclairage à huit réflecteurs tournants du phare de la pointe Saint-Mathieu.




En 1820 apparaît la lampe sinombre de PHILIPS : le réservoir en forme d'anneau creux entoure le bec et supporte un abat-jour (voir Figure 8). L'huile coule vers la mèche avec un débit suffisamment important pour assurer une bonne combustion. À cause de son réservoir qui masque en partie la lumière autour de la lampe, on trouvera surtout ce type d'éclairage aux plafonds et sur les bureaux. Mais son réservoir est plat et non torique, ce qui fait que le débit de l'huile (toujours au même niveau, à quelques millimètres près) est constant, et que l'immense ombre du réservoir disparaît.

Bordier-Marcet place sur ce réservoir disgracieux un dôme de verre dépoli. Ce modèle baptisé par le nom pompeux de "lampe Astrale",connaîtra un grand succès,

Guillaume Carcel pour remédier aux problèmes de réservoirs ronds ou toriques (en forme de vases), projetant des ombres, place l'huile directement sous la mèche, dans le pied de la lampe qui ne projette ainsi plus aucune ombre, ni par le bas, ni par le fond. La physique interdisant à l'huile de remonter d'elle-même d'un point situé si bas.Il modernise un ancien système de lampe à pompe manuelle en le rendant automatique grâce à un délicat mécanisme d'horlogerie faisant mouvoir une tige qui actionne de petits pistons. Elle sera baptisée la pompe foulante de Carcel.

Petite révolution, la lampe à modérateur voit le jour en 1837 (voir Figures 9). Fiable (du moins tant qu'elle est neuve !) et peu onéreuse, elle reprend le principe des lampes à pompe : un ressort comprime l'huile dans le réservoir, qui remonte vers la mèche. L'astuce, pour assurer un débit régulier, est de faire passer le liquide dans un tube de faible diamètre (2 ou 3 mm), solidaire du piston et mobile, dans lequel passe une aiguille fine, le modérateur. Quand la lampe est pleine, le tuyau est bien enfilé dans le modérateur, l'huile à forte pression a du mal à passer ; quand la lampe est bientôt vide, le tube est presque libéré et l'huile à faible pression passe facilement. La clef ronde sert à régler la mèche, tandis que l'autre - souvent joliment décorée - actionne une crémaillère pour remonter le piston au-dessus de l'huile.

Toutes ces lampes, à cause de leur perfectionnement, réclament un entretien important. Il faut les remplir et les nettoyer, en évitant de se salir, régler ou changer les mèches, etc

Bien plus dangereuses sont les premières lampes à essence minérale. L'essence est un résidu très volatil de la distillation du pétrole. À cette époque, elle ne coûte alors presque rien, et plusieurs constructeurs tenteront de fabriquer des lampes dont le réservoir est rempli d'éponge, ou qui utilisent des becs spéciaux...

Vers 1860, MILLE propose ses lampes sans liquide (ou gazo-lampes) : le réservoir contient des fibres d'éponge, censées absorber toute l'essence (voir Figure 29). La mèche pleine s'imbibe au contact de cette éponge, et conduit le liquide en haut du bec étroit d'un demi-centimètre et haut de trois environ. La flamme éclaire à peu près comme une bougie, d'une lumière plus blanche, exempte de fumée. Il n'y a en général pas de système de réglage de la hauteur de la mèche, l'appareil étant déjà économique et peu lumineux par rapport aux grosses lampes.

lampe à pétrole

En 1853, le pétrole lampant, huile enfin fluide, permettant une excellente montée du carburant vers la mèche par capillarité, provoque l'extinction de facto de la lampe à huile.

Charles Pigeon (1838 - 1915) n'a pas, à proprement parler, inventé la lampe à essence. Il fut, par contre, le premier, après quelques essais, à produire et commercialiser un appareil d'éclairage portatif à essence breveté, ininflammable et inexplosible, reconnaissable par le dessin d'un pigeon posé sur un globe terrestre tenant en son bec une lampe.

Le brevet fut déposé sous le numéro 162634 en date du 9 juin 1884. La lampe Pigeon fut présentée à l'Exposition universelle de 1900



Gaz de houille

Philippe Lebon (1767-1804) chimiste, remarque que le "gaz de houille" obtenu lors de la distillation du charbon pour fabriquer du coke est capable de brûler en produisant une flamme vive, presque blanche.

À partir de cette constatation Lebon bien que dès le départ s'il pense utiliser la houille, c'est pourtant vers la distillation du bois qu'il s'oriente pour réaliser ses expériences. À l'époque, le mot « distillation » désigne toute opération qui permet de recueillir des produits volatils par chauffage d'un corps ou d'un mélange. Bien sûr, la distillation du bois donne un gaz de divers composés inflammables, mais aussi du goudron et un résidu réutilisable le charbon de bois.

Le 26.09.1799, Lebon prend un brevet pour un appareil dit “thermolampe” qui devait fournir à la fois de la lumière et de la chaleur. Lors de ses démonstrations l'inventeur place dans un grand caisson métallique des bûches de bois, qu'il soumet à la “distillation sèche” en chauffant par l'extérieur le caisson métallique. La matière organique se décompose sous l'action de la chaleur et donne naissance à un gaz inflammable, et divers déchets comme le goudron et un résidu important le charbon de bois.

Philippe Lebon fait ses premiers essais au Havre sans résulta, puis il éclaire les jardins et les appartement de l'hôtel Seignelay qu'il occupe rue saint Dominique ; mais l'odeur fétide du gaz rend le procédé insupportable.

En 1801, il réfléchit à un projet de moteur à gaz avec pompe d'alimentation et inflammation par un dispositif électrique.
Philippe Lebon décède assassiné à Paris, en 1804.

William Murdoch, (1754 − 1839) un industriel de génie, qui connaissant les essais de Lebon, établit, de 1792 à 1797, les premières fondations d'un procédé de distillation de la houille en vue d'obtenir du gaz d'éclairage. La houille qu'il emploie est loin d'être de bonne qualité. Quoi qu'il en soit, Murdoch obtient ainsi : un gaz brut riche en hydrogène, méthane, monoxyde de carbone ainsi que l'inévitable (SH2) et autres produits faciles à revendre comme :

Le goudron riche en composés aromatiques et polyaromatiques alors utilisé pour le calfatage et qui deviendra le produit de base de la carbochimie.

Le coke qui reste dans la cornue seul, à la vente, couvre le prix d'achat de la houille.

Murdoch, très opportunément, ne s'adresse pas aux particuliers mais aux industriels dont les ouvriers, ne sont pas conviés à émettre leur avis sur les vertus ou les vices de l' éclairage fourni par le patron. Pour sa première démarche, il a la chance de rencontrer un industriel convaincu des bienfaits du progrès, James Watt, dont l'usine de Birmingham se voit, entre 1798 et 1803, peu ' peu équipée. C'est la première réalisation industrielle de la nouvelle technologie.

Pour les ouvriers, ce n'était pas une bonne nouvelle : à partir de cette période, les usines pouvaient fonctionner jour et nuit. La durée du temps de travail augmenta et ce fut le début du travail de nuit

Encouragé par ce succès initial, Murdoch poursuit sa prospection. Ainsi, en 1805 c'est une filature qu'il dote du nouveau système. Malheureusement cette réussite attire la concurrence, en particulier celle de l'Autrichien Winkler qui s'installe à Londres, sous le nom de Winsor. Il fonde, en 1812, la première usine à gaz qui éclaire l’avenue Pall Mall. Les illuminations permanentes qui s'en suivent commencent à convertir les londoniens éblouis aux mérites du gaz.

Les industriels voient dans le gaz d'éclairage des perspectives lucratives et peu à peu des sociétés se créent, chacune avec son usine à gaz. C'est d'abord, en 1813 aux Etats−Unis, puis Pauwels, en 1820, crée, au 97 du faubourg Poissonnière, un gazomètre de 196.000 pieds cubes puis en 1821 la Wilson et Cie avec l'usine des Ternes, Pauwels à nouveau en 1822 avec l'usine de la Tour du Temple. En 1834, la compagnie de Belleville en crée une au 20 rue Saint−Laurent à Belleville ; en 1835 la compagnie Française, à Vaugirard ; en 1836, la compagnie Parisienne, à Ivry ; et en 1838 la société Pédartel et Cie, à Passy. Celle−ci a pour objet d'assurer l'éclairage de Passy et d'une partie du 1° arrondissement (section des Champs-Élysées et de Chaillot).

Rapidement la société Pédardel et Cie devient la "Compagnie de l'Union pour l'éclairage au gaz de la houille" qui se dissout elle−même en 1841 pour devenir la "Compagnie de l'Ouest".

Entre temps, la compagnie a été, le 1° janvier 1843, adjudicataire pour 18 ans de l'éclairage de la commune de Neuilly les Ternes. En 1847 elle obtient la concession, également pour 18 ans, de l'éclairage de la commune d'Auteuil. Le 28 avril 1851, elle traite avec la commune de Puteaux. Elle obtient les droits à l'éclairage sur les communes de Boulogne et de Courbevoie.

Les différentes usines à gaz sont conçues sur le même schémas : elles comprennent plusieurs bâtiments où l'on procède aux nombreuses opérations nécessaires à la fabrication du gaz, notamment une salle des "batteries" où le charbon est placé dans des cornues. Un autre bâtiment, la briqueterie, sert à la fabrique des cornues et des fours, comprenant le broyage, le moulage et la cuisson de l'argile. Enfin dans une autre partie de l'usine se trouvent les immenses appareils où se préparent le goudron et ses différentes transformations industrielles. Il y a aussi des “salles d'hygiène” où les ouvriers prennent avant et après le travail toutes les précautions et les soins de propreté que nécessite leur dur métier.

L'éclairage des particuliers, avec l'apparition, par la suite, de la plaque " Gaz à tous les étages " date de 1830.

Eclairage individuel au gaz

Aux premiers becs, simples trous d'épingles, succèdent les becs à flamme papillon (voir Figures 11) : une flamme plate s'échappe d'une petite boule fendue, permettant ainsi une bonne oxygénation (on retrouve le système de la mèche plate).

Par la suite, la base du bec est entourée d'une fine toile métallique (voir Figure 15), de fentes verticales ou d'une enveloppe en porcelaine.




Les becs d'Argand à gaz offrent une lumière blanche et fixe, bien supérieure aux lampes à huile, en dépit d'une consommation élevée.

En général, une petite manette (terminée d'une boule en bois pour ne pas qu'on se brûle !) permet d'abaisser la flamme en veilleuse

Dans les appartements, les appliques sont fixées aux murs et complètent les plafonniers. Les trotteurs, reliés par un tuyau souple, permettent de déplacer la lumière plus librement qu'avec les bras articulés, appelés genouillères. On trouve également des adaptateurs pour convertir ses lampes à pétrole au gaz

pour allumer le bec, rien de plus simple : craquer une allumette, ouvrir le robinet, attendre quelques secondes, et présenter l'allumette au-dessus du verre (bec d'Argand) ou du globe (bec papillon).

Pour améliorer le rendement lumineux des becs à gaz, les praticien ont eu l'idée de porter à incandescence des corps incombustibles. En 1886, AUER VON WELSBACH entoure la flamme d'un manchon composé de thorium et d'yttrium,et en 1890, d'un manchon de coton imbibé de nitrates de thorium (99 %) et de cérium (1%) est calciné : il en résulte une « toile » d'oxydes de ces terres rares, qui chauffée à l'intérieur d'une flamme de gaz émet une vive lumière très blanche.

les becs renversés (voir Figur44), inventés peu après, suppriment l'ombre gênante et éclairent vers le bas,

Grâce à cette configuration, les cheminées de verre ne sont plus indispensables.


















Eclairage urbain à gaz :

Des lanternes au gaz ont été mises en service pour la première fois en France le 1er janvier 1829. Quatre lanternes de ce type éclairaient la place du Carrousel, à Paris. Le 2 janvier 1829, douze appareils du même type sont posées rue de Rivoli. Trois mois plus tard, des candélabres destinés à supporter ces appareils sont conçus. Les premiers ensembles sont posés le long de la rue de la Paix et sur la Place Vendôme.

Entre 1830 et 1850, de nombreux réverbères à huiles sont remplacées par des lanternes au gaz. Au milieu des années 1840, la quasi intégralité de la ville de Londres et la moitié de la ville de Paris sont éclairées au gaz.

En 1846, une ordonnance définit des situations de monopole pour 6 sociétés fournissant les lanternes de gaz. En 1855, Haussmann organise la fusion des 6 sociétés gazières en concession unique à la Compagnie parisienne d'éclairage et de chauffage par le gaz. A partir de cette époque, l'éclairage au gaz s'étend et s'intensifie dans toutes les grandes agglomérations du pays. C'est l'entrée de la France dans l'ère industrielle.

Durant la seconde partie du 19ème siècle, de nombreuses conceptions de bec à gaz voient le jour: Bec d'Argand, bec Manchester, bec Dumas, bec à gaz réchauffé, bec Delmas-Azéma et le bec Multiplex, Bec albo-carbon et le Bec AUER. Chaque bec fournit une flamme d'allure différence, certains fournissent une flamme plus intense que d'autres, d'autres sont plus économiques. Les innovations se succèdereont jusqu'à l'arrivée de la lampe électrique à la fin du 19ème siècle.

Les premiers candélabres en fonte :

Les premières lanternes d'éclairage public n'étaient fixées uniquement sur consoles murales ou suspendues. En 1830 apparaissent les premiers candélabres. C'est aux environs de 1850 que l'éclairage public commence réellement à se répandre dans tous le pays. Des candélabres sont ainsi posés dans toute la France, faisant place à une cohabitation entre l'éclairage à l'huile et l'éclairage au gaz. Les candélabres possèdent l'avantage de pouvoir véhiculer un conduit de gaz. Les gammes de mobilier urbain se diversifient, les décors varient en fonction de leur lieu d'implantation et donnent lieu à des créations de plus en plus originales et dessinées.

Au début, les fabricants de réverbères étaient plus ou moins libre pour la fabrication de leur mobilier. Mais suite à de nombreux accidents dus à la mauvaise qualité de certains candélabres, ils furent amenés à fournir uniquement des candélabres en fonte, plus solide et plus résistants, comme en atteste ce passage:

L'éclairage au gaz va donner la génération des "becs de gaz". L'éclairage des rues incite à veiller tard, à sortir et à fréquenter les débits de boissons. Conséquences : les couche-tard rentrent chez eux en titubant, s'accrochant aux réverbères, lesquels plient sous leur poids : les conduites de gaz se fissurent ou cassent et c'est l'accident. Les fabricants de réverbères sont donc amenés à en construire en fonte, solides et résistants dans les années 1880.